Le 21 mars dernier, le
ministère de l'Intérieur a convoqué et organisé une grand messe
appelée Instance de dialogue avec l'islam. 150 personnes, cadres
religieux, imams, observateurs du fait musulman, policiers et
hauts-fonctionnaires ont fait le déplacement Place Beauvau.
Cette
instance se réunissait pour la seconde fois. La première fois, ce
fut quatre mois après les attentats du mois de janvier contre
Charlie Hebdo. Des jeunes, des conférenciers, des associations
ancrées et légitimes comme le CCIF, y avaient été convié au
milieu des caciques de l'UOIF, du RMF et de la Mosquée de Paris.
Cette fois-ci, la seconde réunion a été organisée quatre mois
après les attaques du 13 novembre.
Ce processus de renouvellement et
de rafraîchissement de la dynamique représentative du culte
musulman impulsé par le pouvoir poursuit un objectif : tenter de
faire réémerger une instance musulmane plus légitime et plus
représentative, après l'échec absolu du Conseil français du culte
musulman, déchiré et atrophié par ses luttes intestines de
chapelles consulaires, dévoré par son apathie congénitale.
Le CFCM avait été crée
officiellement pour résoudre les problèmes de culte de la
communauté musulmane en France : le manque de mosquées dignes dans
certaines régions, de carrés musulmans dans les cimetières, le
manque criant d'abattoirs pour permettre aux fidèles de célébrer
le sacrifice de l'aïd al adha qui devient une pratique en voie de
disparition réduite tout juste à un don de substitution, le déficit
d'aumôniers dans les prisons, l'organisation du hajj, etc. 13 ans
après la création par le ministère de l'Intérieur de cette farce
institutionnelle, aucun de ces dossiers n'a été réglé. Aucun.
Contrôle,
domestication et infériorisation : la doctrine de l'Etat
français sur l'islam
La création du CFCM a
montré par ailleurs quelle était la doctrine d'Etat française sur
l'islam : un régime d'exception appliqué sur l'islam et justifié
par sa dangerosité «révolutionnaire» au sens global de ce mot. Le
pouvoir colonial avait, souvenons-nous en, en son époque fermé les
mosquées qu'il ne contrôlait pas en Algérie, interdit
l'enseignement de la langue arabe, crée ses institutions et fondé
sa propre noblesse religieuse au service de l'Etat, afin de s'assurer
un contrôle complet de la religion musulmane. Ce contrôle à tous
les niveaux( surveillance généralisée et accentuée des mosquées,
mises sur écoutes des cadres associatifs, mise en place du CFCM et
domestication des fonctionnaires du culte) est le cœur de cette
doctrine qui n'a pas vieilli d'un trait, ni changé d'un iota.
Cette fois-ci, le
développement d'actes de guerre sur son territoire a poussé l'Etat
a accéléré son travail. L'inertie spectaculaire des cadres
musulmans cooptés par la République a obligé la Place Beauvau a
agir. La première réunion de l'instance élargie était un signal
envoyé à l'organisation terroriste surgie des abîmes de la
politique étrangère franco-britanico-américaine au Moyen Orient.
Le message politique était le suivant : la France et ses musulmans
sont unis contre vous, nous sommes unis et vous ne pourrez pas nous
divisez. Message factice d'une guerre factice.
La seconde réunion a été
beaucoup plus explicite : l'ensemble du personnel religieux musulman
français a vocation à servir de supplétifs dans la guerre de la
France contre le terrorisme. Des auxiliaires de police affectés
gratuitement au nom de l'islamité commune qu'ils partagent avec les
terroristes, ces âmes perdues issues de leur propre troupeau. Imams
et responsables associatifs, agents de liaison consulaires marocains,
algériens ou turcs, tous semblent enthousiastes à l'idée de servir
la France et s'estiment heureux de l'honneur qu'il leur est fait
d'accomplir cette mission. Laquelle ? Ils ne le savent pas
précisément eux-mêmes mais après tout, l'essentiel était
d'accepter.
Car que seront-ils chargé
de faire au juste ? S'agira-t-il de diffuser aux ouailles du vendredi
un message clair et ferme de condamnation du terrorisme, cette
entreprise diabolique faucheuse de vies humaines ? De surveiller
leurs fidèles, de dénoncer de potentiels criminels, mais sur la
base de quels critères ? On voit mal des individus impliqués
dans des opérations de guerre haranguer leurs coreligionnaires pour
les inviter courtoisement à les rejoindre. C'est faire injure et
disgrâce aux fidèles mais encore à la raison elle-même. On feint
de l'ignorer, on se refuse à y croire, mais les mosquées ne
produisent pas plus qu'elles ne nourrissent la moindre arrière-pensée
terroriste, ce que les agents de la DGSI pourraient très bien
expliquer à leurs collègues des services de police nationaux, à
défaut des imams, eux-mêmes variables d'ajustement de bureaux
associatifs fragiles et rigides, et qui seraient bien en peine de le
leur faire comprendre. Les mosquées en France sont un enjeu
fondamental de sécurité intérieure pour l'Etat. Depuis la fin des
années 1980, date des premiers attentats, la totalité des mosquées
sur le territoire français sont l'objet d'une surveillance sans
faille en collaboration avec les pays d'origine. Chaque association
musulmane qui a pignon sur rue se voit l'objet d'une visite d'un
membre des renseignements généraux. Depuis des décennies, les
choses fonctionnent ainsi et un bon nombre des freins constants observables aux projets de constructions de mosquées leurs sont imputables.
Le sursaut moral
indispensable de la conscience musulmane
Et pourtant nous disent
des experts, mais les experts mentent ou pèchent par naïveté,
pense-t-on : les actes terroristes ne sont pas le résultat d'un
quelconque cheminement religieux de ses auteurs, d'une conversion ou
d'une fréquentation de mosquées ou d'association musulmane. Ses
auteurs sont bien plutôt le fruit d'un échec patent et total de la
société française dans la mesure où tous sont quasiment issus du
grand banditisme, de la délinquance armée, des milieux du braquage
et de la criminalité. Leur rupture est sociale et individuelle. Rien
de religieux là-dedans. On le sait, mais l'Etat au nom de sa propre
doctrine, n'y croit pas.
Ainsi, les musulmans sont
cooptés et utilisés comme de vulgaires outils dans la lutte menée
contre le terrorisme. Ce processus de réification est l'étape
logique et secondaire d'un processus de déchéance morale de
l'ensemble des acteurs institutionnels de l'islam de France toutes
tendances confondues qu'il n'est pas utile de rappeler, tant nous
l'avons fait dans le passé.
Ainsi, outre le fait
qu'aucun des besoins ni même des intérêts de la communauté
musulmane ne seront satisfaits ou préservés sur le plan cultuel, ce
qui était rappelons-le encore, l'objectif visé par la création du
CFCM, il n'y aura aucune contrepartie à ce travail de flicage et de
sous-traitance policière, faute d'acteurs crédibles, indépendants
et intègres.
Pis. L'islamophobie qui s'installe dans ce pays est
majoritairement, nous disent les acteurs engagés sur le terrain, le
produit des institutions de l'Etat (mairies, préfectures,
commissariats, écoles, etc) et, à ce titre, est niée dans son
expression par les agents de l'Etat, les hauts fonctionnaires du
ministère de l'Intérieur et le Premier ministre qui est
personnellement hostile à l'usage du mot «islamophobie». La
dernière sortie de la ministre des Droits des femmes, dont
l'intitulé même du ministère signifie la rupture de l'égalité
républicaine non pas en tant que réalité illusoire mais comme
horizon politique, a illustré une nouvelle fois la permanence et la
continuité de cette doctrine.
Peut-on imaginer pire situation
d'abaissement, de servilité pour les musulmans en France ? Cette
infériorisation consentie elle-même par le personnel
politico-religieux des mosquées ou associations musulmanes est
insupportable. Rien n'oblige ces agents du culte de se faire les
instruments d'un emploi politique et sécuritaire pour lequel ils
n'ont pas été mandatés par leurs fidèles, ni même formés, et
quand bien même le seraient-ils qu'ils ne le devraient pas au nom de
l'éthique et du devoir d'intégrité morale. Ils ne doivent plus se
faire les idiots utiles d'une organisation politique, l'Etat, qui les
utilisent au gré de ses propres intérêts et qui n'hésite pas à
violer autant qu'elle le souhaite ses propres engagements en ne
respectant pas les principes de laïcité qu'elle a si souvent
utilisé contre ces mêmes musulmans accusés de ne pas s'y
soumettre.
Contre l'islam d'Etat,
un premier pas vers la liberté
Une organisation qui a
procédé dernièrement à la liquidation politique, psychologique et
symbolique, la purgation, de ces hommes et femmes de confession
musulmane et/ou binationaux, du corps de la Nation au travers du
débat sur la déchéance de nationalité, les expulsant du champs
théorique de l'égalité, procédant à la rupture du contrat social
et comme l'a dit un journaliste «sang-mêlé», à leur relégation
aux catégories inférieures de «Français
sous réserve, Français d’occasion, Français en sursis».
Une organisation, enfin, qui se dédouane de sa propre faillite à
assurer la sécurité de ses ressortissants sur cette catégorie de
la population toute désignée, du fait de sa misère, pour cet
emploi de bouc émissaire.
Ces cadres religieux doivent se consacrer
pleinement à leurs mission qui est d'organiser le culte et d’œuvrer
en faveur de l'excellence de la pratique et de l'enseignement de la
religion musulmane, de l'éducation, de la formation et de la
transmission de l'islam dans leur propre espace communautaire, ce qui
n'est pas peu de choses, et se retirer définitivement du champ
politique institutionnel. Cette époque de la soumission indigne et
obséquieuse de leaders religieux à une organisation politique est
révolue, elle doit l'être.
Le jour où les musulmans de ce pays
décideront souverainement de se doter d'une organisation
représentative, s'ils le jugent nécessaire, et qu'ils seront
suffisamment mûrs et organisés pour le faire, alors il sera temps
ce jour-là de s'interroger sur le type de relation qu'ils doivent
entretenir avec les agents de l'Etat français, car ce jour-là, ils
seront libres de le faire.
Bonjour,
RépondreSupprimerCe que vous signalez concernant la surveillance des lieux de cultes musulmans, notez, et je viens de le découvrir, est ou a été valable aussi pour les chrétiens car cette surveillance de l'Etat est marquée noire sur blanc dans la loi elle-même de 1905 sur la soi-disant laïcité de la soi-disant république soi-disant française, visionner pendant une à deux minutes ce fait expliqué à partir de 1h06'18'' dans cette vidéo :
https://www.youtube.com/watch?v=EKZtqeNd1q0
Bonne réception, et bien à Vous
Delta de la Lyre
http://www.choix-realite.org/author/delta-de-la-lyre