dimanche 30 novembre 2014

Le vagabond des étoiles




A Jack London...

O peuple de la nuit ! Vallée d’étoiles mortes, cohorte de corps sans âmes. Foule bannie des foyers paisibles, bercés par la chaleur apaisante des cheminées dorées. O sombre légion d’esprits agités, du lit éternel de la paix, refoulés. J’ai vu ton pas inquiet franchir le territoire des ombres et s’inviter à mon insu sur les sentiers perdus de mon cœur, mis à nu. Halte là. Cette porte vous est interdite. Rebroussez chemin, je ne suis pas issu de vos rangs. 


C’est vrai, je l’avoue j’ai parfois arpenté les couloirs pathétiques de la peine, lâche et sinueuse. Oui, j’ai échoué tout comme vous mais comme vous, je n’ai pas renoncé. Je ne suis que de passage et les mirages de la désolation, infinie, obscure, froide comme la mort, les bras si magnanimes, si généreusement ouverts aux voyageurs du désespoir, le sourire cynique et le front plissé, la tunique sanglante et les meurtrissures cachés, toutes ces plaies béantes ne sont pas pour moi, je ne suis pas près d’y céder.


Je poursuis une autre voie. Alors demi-tour. Le projecteur lunaire ne cesse de vous harceler, braquant vos visages éblouies et harassés par le spectre pâle du tortionnaire, je le sais. Je connais tout cela mais toutes les routes aussi détournées soient-elles ont une sortie. La mienne est proche et j’ai survécu à la Nuit la plus longue de ma courte vie. Le choix s’offre à vous : rejoignez-moi ou disparaissez. A vous votre destinée et à moi la mienne.      


vendredi 28 novembre 2014

La complainte de l'insomniaque



Je suis à la recherche d'une nuit de sommeil, une authentique et véritable nuit de sommeil, ce qu'on appelle l'envolée nocturne, l'excursion céleste, la sortie de soi vers l'ailleurs, l'enclave du repos, la source chaude de la délicatesse, le lit douillet de la terre, le souffle tiède de l'Eden, la paisible obscurité des fonds. Je cherche mais je ne trouve pas. Quand la nuit vient te traquer dans l'antre sépulcrale de ton refuge, qu'elle t'aspire et te renvoie vers le monde lunaire, te voilà debout, titubant dans la lueur astrale. Une fois sortie de l'eau inférieure, de ce liquide précieux qui t'enveloppe de ses bras consolateurs, tes pas sont lourds et ton esprit de plomb. Je cherche la nuit d'un rêve, la soie d'un drap, l'abysse, O calice emporte moi au pays de l'oubli où nul ne troublera plus mon repos... 

jeudi 27 novembre 2014

Dans la tempête...















Plus que jamais, je suis le capitaine d'un navire emporté dans les affres de la tempête, transpercé par les 7 rugissantes, frôlant à chaque instant la mort, naviguant entre les lames du péril. Par Dieu, je franchirais les colonnes de l'abîme ou périrais dans les eaux glacées de la Nuit.

samedi 22 novembre 2014

Oui, peut-être


















Ecris peu, écris mieux. Ecris loin pour écrire bien. N’écris pas pour les autres mais écris-toi pour être des nôtres. Appliques-toi, ne répliques pas. Abstiens-toi et tu verras ce qu’il faut voir. Laisse ton esprit prendre la plume et la tremper dans l’encre écarlate de ton cœur. Ce que tu n’as pas écrit de ton sang s’effacera dans l’instant. Il n’est pas de vérité née d’un livre, seulement des bribes tombées de l’Au-delà, rosée vite convertie en Lois. Sois ce que tu dois et fais ce que tu sais. Et n’oublie pas de vivre.  

Chronique pré-mortem

Le cavalier, la Mort et le Diable de Dührer. 

Hier soir, j’ai défié la Mort. Deux années déjà s’étaient écoulées depuis notre dernière rencontre. Cet instant fatidique, je ne l’oublierais jamais. Les moments de crise sont des moments de révélation. Ce soir-là, j’avais appris deux ou trois vérité sur moi que j’ignorais. C’est ainsi que j’ai su que notre relation à elle était vaine et que rien ne préparait à sa rencontre, eussions-nous été de la première piété. Notre âme nous échappe, notre corps nous trahit. Le doigt asphyxiant de l’Ombre fatale s’était posé sur ma poitrine. Eu-t-elle posé la main que je serais passé de l’autre côté. Depuis, plus rien. La vie s’est comme suspendue. Mourir, c’est avoir peur de mourir. Les dernières bouffées d’oxygène s’étaient raréfiées et je semblais humecter les gouttes ultimes d’une gourde désormais vide de vie. J’avais soif de vivre. Etonnant. Qui avait-il de si précieux qui méritât d’être sauvé ? S’éclipser de la scène mondaine, j’en rêvais, et pourtant. Vivre, c’est ne plus avoir peur de mourir. Les vivants ne s’en doutent pas, les morts ne s’en préoccupent plus. Les hommes en sursis s’interrogent dans l’antichambre de la Mort. Le sommeil nous enlace et le rêve nous aspire vers des univers extraordinaires. Je vole, nous volons ensemble vers les Cieux. Le monde ne semble plus être ce qu’il était. Alors ? Alors, j’ai défié la Mort du regard. Par lassitude, par esprit de révolte. Prends ce que tu veux, je ne te crains plus. L’Enfer est l’absence de Dieu. Et tu mourras toi aussi. Comptes sur moi pour te le rappeler. 


samedi 15 novembre 2014

Liberté, que de crimes on commet en ton nom...
















Je m'interroge. Irions-nous jusqu'à dire qu'un célibataire est un homme libre qui s'ignore et l'homme marié un esclave qui se découvre ? Un homme en cellule fait-il l'expérience de la liberté dans sa privation, mieux qu'un homme libre dans sa damnation sociale ? Si la liberté doit s'acquérir dans la souffrance, est-elle encore liberté ? Un homme d'état africain avait dit un jour cette phrase : "Je préfère rester libre dans votre prison que prisonnier dans votre société". Il avait été incarcéré pour ses idées. Jusqu'où faut-il aller pour rester libre ? A quel prix faut-il l'estimer ? Etre juge et partie de soi-même. Il n'y a pas de réponse juste à une question absurde. Il n'est pas de requête légitime qui soit fondée sur la souffrance d'autrui. Une nuit de plus dans la Nuit de l'esprit...        Allah.

dimanche 9 novembre 2014

La place de Dieu
















Entre le pécheur et le péché se trouve 

la distance du Ciel et de la Terre. 

Tu y trouveras l’inertie insouciante du vide négateur. 

L’espace magnanime de la repentance sincère. 

Le vent fécond du pardon. 




















La brise gelée du regret. 

La houle secrète des nuées célestes. 

La pluie douce de l’oubli. 

La nuit obscure des pauvres âmes. 


















Le froid glacial du soir, o désespoir. 

L’aurore rougeâtre du toit sacré. 

La sonate mineure des frêles rongeurs. 

L’adhan furtif des Anges oisifs. 















L’été divin des pieux pèlerins. 

L’automne fugace des vieux rapaces. 

Entre le pécheur et le péché se trouve la distance sacrée. 

La place de Dieu. 


samedi 8 novembre 2014

Réminiscences


















-Heureux sont ceux qui ont un cœur de loup car ils vivront en maître  dans ce monde ou périront en héros...

                                                    












-J’ai allumé un feu dans mon cœur pour y brûler toutes les idoles. Les  êtres aimés ont péri.  Les passions terrestres se sont embrasées. Les souvenirs, réduits en cendre. 

 Croyant la tâche terminée, je me préparais à prendre la route, mais le  feu brûlait toujours.  Il restait des choses. J’ai vidé la totalité de mon  sac. Livres, babioles, parfums. Ecrits,  documents, photos. De tout cela,  je n’avais plus besoin. 

 Le feu ne voulait pas s’éteindre. Bon sang, mais que restait-il ? Tout  avait volé en fumée.  Presque tout. Mes proches s’en étaient allés.  D’amis, je n’avais plus déjà, depuis une  éternité. De mémoire  d’homme, mes traces s’étaient effacées. Quoi alors ? Je cherchais. 




















Mes ennemis repensaient-ils à nos combats ? Je n’avais plus de haine pour eux, je n’en avais jamais eu. Mes œuvres elles-mêmes étaient restées, tout comme moi, dans l’ombre. Alors ? Oui, sans doute. Il restait une chose. Moi. 

Il fallait donc finir ce qui avait été commencé. Je me dirigeais d’un pas cérémonial vers ce bûcher sauvage des vanités ancestrales. Par Dieu, je brûlais. Par Dieu, je renaissais. 

La vase égotique s’évaporait, la peau de l’âme, calcinée, tombait. La chaleur de la destruction me réchauffait le cœur. La souffrance disparaissait et ses cris se noyaient sous les litres de soulagement déversés par ces yeux qui ne m’obéissaient plus, pas plus que ce corps ne l’avait fait. 


















Par Dieu, je n’existais plus. L’heure ultime du retour vers l’Etre touchait à sa fin. Et c’est ainsi que je fus, enfin.  
   



                                                      
-Ne juges jamais car tu es perdu. Ne juges plus, car maintenant tu sais. Tu sais que le  meilleur peut-être engendré par la boue et qu’il fut un temps où les ténèbres ont voilé la  lumière d’un feu intime et déchu. 

 Maintenant que tu sais qu’il est vain de juger, apprend à pardonner et à aimer Celui qui  aime même quand tu l'as oublié. 

 Tu es perdu. Tu as perdu. Tu le sais maintenant, alors célèbre la  victoire des vaincus, la  défaite des proches, la reddition des illusions. Le retour de l’aube.