samedi 30 mai 2020

Connaître ses limites


Celui qui connait ses limites saura les repousser avec le temps et l'expérience. Celui qui les ignore finira par les découvrir de la plus douloureuse des manières, en les heurtant de plein fouet. La limite a beaucoup de choses à nous enseigner, le respect des autres, le respect de soi, la vie en société... Etre soi-même sa propre limite, c'est élargir le chemin des autres, par la grâce de notre volonté, cette force tranquille. Ceux qui s'aventureraient à franchir vos limites découvriront bientôt cette force, cette limite, leur limite. Le respect se gagne, le respect s'enseigne, le respect s'incarne. Sans limite, point de liberté, sans limite, point de désir, point de plaisir ou de joie. La beauté elle-même exige la forme, sans quoi rien ne peut la distinguer. En toute chose, la limite fait apparaître et connaître, voir et contempler, y compris chez Dieu. Certes, il est bien entendu qu'aucune forme ne peut contenir Sa Beauté, ni aucune limite restreindre Son Pouvoir. La création et ses limites inhérentes ne doivent pas être conçues comme une restriction de Son Pouvoir mais comme le dévoilement à l'Homme de la grandeur suprême du Créateur, Sa Manifestation inédite par le truchement de Son Oeuvre mystérieuse. Ceci est ce qu'il est convenu d'appeler la connaissance extérieure de Dieu par la connaissance de Son Oeuvre. Quant à la connaissance intérieure ou essentielle de Dieu, elle relève de l'entre-connaissance amoureuse ou résorption par l'esprit, et ceci est autre chose. 

dimanche 10 mai 2020

Le théorème de l'amour

Le souvenir de la faute passée est un châtiment bien plus implacable pour l'Homme de conscience que la sanction réelle que pourrait lui infliger les autorités pénales ou religieuses de son temps. Cette sanction, par sa dureté, a aussi la vertu de racheter l'Homme de sa faute en lui offrant la possibilité de réparer le mal fait, et plus important encore, en lui ouvrant une voie vers le pardon de soi. Il est douloureux pour un esprit droit de se pardonner à lui-même ses torts lorsque l'oubli n'a pas accompli son office. Ce serait accepter d'être autre chose que lui-même, d'être autre chose que l'idée qu'il se fait de lui-même et cette idée est tout pour l'Homme. Le souvenir de la faute accomplie ne csse de hanter son âme jusqu'à ce que la Mort lui en dévoile la nature exacte. La nostalgie de l'être perdu le poursuit comme une cicatrice qui ne s'efface plus, piqûre de rappel d'un passé enraciné dans nos chairs. C'est ainsi qu'est démontré par la plus rigoureuse des argumentations la supériorité de l'amour sur la justice. L'amour expansif dont la miséricorde est une manifestation transfigure l'âme des Hommes et leur offre le véritable rachat par le renouvellement de l'être. La justice corrige et par ce redressement ne nous offre au mieux que le retour à un ordre équitable avec nos contemporains, ce qui est en soi un compromis raisonnable et acceptable. Mais l'amour expansif est différent, pense autrement. Il nous transforme et nous déplace en nous élevant là où nous n'étions pas. Grand alchimiste, il sait lever la malédiction de la faute par la grâce de la conversion divine. L'amour expansif signifie bien autre chose que l'éphémère incendie de la passion amoureuse. Il nous émancipe et nous déleste du poids de la culpabilité en nous offrant un horizon plus large et une perspective de vie apte à nous libérer de la douleur. Mais c'est aussi la plus exigeante des voies et bien peu de voyageurs se sont risqués à l'emprunter. « C'est là une chose à laquelle n'atteignent que ceux qui exercent la patience, ceux qui ont reçu une faveur insigne. » Coran. 41.35