samedi 27 avril 2019

Un secret




A l'aube des derniers jours, 
A l'heure où s'éveille le boiteux, où dort le sourd 

Le long d'une frontière, voguant
Sur la cime oubliée du temps.

J’aperçus une forme.

Une silhouette, un regard
Une voix. Un souffle.

Sur la mer de mon esprit agité,
Par toutes ces vagues givrées, giflé,
Déchirant la brise sans retour possible,
J'avançais.

Je questionnais : qui parle ?
D'où tombe cette mélodieuse averse ?
Silence.
Avance, me susurraient les matelots.
Tu le sauras. Bientôt.

Au seuil des vallées, sur le fronton des grottes
Je marchais, progressais, à la sueur des bottes.
En vain. La forme de l'inconnue présage, fuyait.


Inlassablement, je répétais . D'où vient ce cantique ?
Ce plaidoyer, ce rire, ce chant cosmique ?
Tu n'as pas été assez loin pour le savoir
Me jeta dans l'oreille l'écho d'un miroir

A qui veut le mot de la fin, l'extrême onction,
Aucune limite n'est possible.
Il faut donner plus que nous recevons
Me dit l'ombre au sourire paisible. 


Il suffit. Dis moi, toi le saint, toi le sage
Qui se cache dans cet auguste manoir ?
Je sonde, je cherche, découvre un passage.
Et me glisse dans la pénombre du soir.
Ci-gît une pancarte dorée : «Que nul n'entre ici
S'il n'est poète. Et que soit maudit le sot valet,
Que l'emporte la tempête ». Viens, je te prie
Me dit la prêtresse, d'une voix esseulée.

Je suis la matrone des voyageurs, des sombres héros
De l'esprit. On m'appelle Muse, Antigone, Calypso
On m'épie le jour, me poursuit la nuit tombée
Pour me déposséder de mes mots, célestes envolées.
Me couper les ailes, mes cordes vocales,
Qu'on dit hantées d'un son ancestral.



Approche. Et contemple de près ce visage
Dont nul avant toi n'aura bordé le rivage
Tu me cherchais, méditant mes stances
mystiques. T'élevant, avec constance
Jusqu'aux sommets, loin de la médiocrité
Où règne la féroce hyène Banalité.

Dans mon éprouvante solitude, je t'attendais.
De tous ces dons, ces offrandes inachevées
Telle une pluie déversée sur le monde,
Je m'écoulais, me dispersais au gré de l'onde

Cherchant le lit où me repaître, le chemin
Sacré. Là où meurent les fous,
là où naissent les anges.

A présent, lèves le regard et sois attentif. La Terre m'a parlé.

Les portes s'ouvrent. Observe la scène !
L'heure arrive, à franches galopées. Relâche-toi !
Oublie la demeure vieille, blafarde, obscène
Qui t'opprimais. Et dit, soulagé : « Éternité ! Me voilà. »

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