Il
faut rompre les amarres, lever l'ancre et partir au loin, vers le
large. Les tergiversations ne sont plus d'actualité. Que veut-on
vraiment ? Atteindre l'Absolu ou se résoudre à la mort lente
et ignoble que nous propose cette époque laide, malsaine et sans
honneur ?
Pour se hisser et s'envoler vers la Vie, pour
l'embrasser à pleines lèvres, pour l'étreindre sans ménagement,
il n'est pas d'autre voie que la rupture totale et sans faiblesse
avec nos contemporains.
Tout ceux qui tremblent à cette alternative,
et la cohue de plaideurs qui, d'un haussement d'épaules, tenteront
de nous convaincre par des sermons à la pureté de fange de revenir
à la raison d'une société qui n'en a plus aucune, toute cette
masse hideuse n'est plus en mesure de nous arrêter.
Les
mensonges des philosophes, qui promettaient plus qu'ils ne pouvaient
tenir, nous ont éloigné de la connaissance véritable.
En allant
s'échouer dans les abîmes vengeresses de la nuit de l'esprit, ces
apôtres du désespoir, morts comme ils ont vécu, ont eu le destin
qu'ils méritaient.
Ces imposteurs qui de la sagesse, se sont
appropriés l'enseigne, et des sages, le mérite, ont égaré des
générations d'aspirants.
Et le modèle négatif de ces âmes sans
lumière et de ces cœurs sans vie, doit éternellement nous servir
de leçon.
Pour ne pas oublier où mène l'orgueil. Pour reconnaître
les traits rugueux de son visage. Pour identifier le son acrimonieux
de sa clameur. Pour persécuter sans relâche l'ombre de ses spectres
revenants.
La
trahison des politiques qui, à leur tour, ont vendu leur âme au
démon du pouvoir, ont conduit les peuples à leur perte, le ventre
plein de fausses promesses et le regard hébété, pareils à des
ovins qu'on engraissent, avant de les conduire à l'abattoir.
La
lâcheté des théologiens n'est pas la moindre. Ceux qui ont négocié
la pureté du message des Textes sacrés pour une bribe de notoriété,
se laissant lentement glissés le long du sentier de l'âme qui
susurre des vocations interdites, tournant le dos à leurs
convictions pour se hisser, un bref instant, sur les épaules d'un
Titan de fumée, ont provoqué, sous leurs funestes pas, une
avalanche de désolation.
L'an
I de l'ère de Qaroun n'était pas encore achevé que nos
théologiens, philosophes et politiques s'empressaient de confier
leurs destinées aux nouveaux maîtres des temps : les argentiers.
Lorsque
le soleil décline et que les chauve-souris surgissent des brèches
ouvertes par la Nuit ; lorsque des nations de moustiques aiguisent
leurs aiguilles voraces avant de fondre sur le genre humain ; lorsque
les charognards lèvent opportunément le camp en quête de
dépouilles précoces, alors lèves-toi et saisit le feu.
Tison,
flambeau, bûcher, qu'importe ! Saisit-le et brûle les ailes
ténébreuses des démons volants, aux orbites dévorées par Satan.
Que ces émissaires enivrés de sang, avant-garde de la cécité
libérée par Prométhée, soient défaits !
Repousse la progression
du sable, et brise, à l'instar d'un roc de vérité primaire, les assauts des vagues de l'insignifiance déferlant sur l'esprit.
Mets toi en
marche, lèves tes armées, et part à la rencontre de ces bêtes
difformes nées des échanges incestueux entre mère Laideur et fille Cruauté.
Et
si tu es seul sur le chemin, et si tes alliés te faussent compagnie,
alors dédouble-toi, multiplie-toi, et sois sans crainte, car pour
faire fuir l'ennemi, il suffira d'un cri.
Et comme ton frère,
l'ouragan, dissipant sans effort la fumée des vaines ambitions, d'un
seul coup de clairon, tu abattras ces légions.
Il
faut rompre les amarres, lever l'ancre et partir au loin, vers le
large.
Pour
trouver l'espoir, s'abreuver à sa source, désespères de cette vie,
d'un désespoir accompli. Déraciner les attaches, survoler le
désert.
L'espoir
est ailleurs, et son reflet n'indique pas sa présence, mais sa
distance.
Pour y parvenir, il faut avoir suivi, au préalable, les
trois sentiers de la nécessité.
Sur
le premier sentier, nous poursuivrons nécessairement l'illusion pour
en découvrir la marque.
Sur
le second sentier, nous comprendrons la nécessité de rompre
radicalement avec les faux-semblants, ces marécages inconsistants,
pour mieux nous élancer et plonger dans l'Océan de l'éternel
instant.
Sur
les pas du troisième sentier, nous consentirons à nous dévêtir de
nos habits terrestres, prêts à nous mettre à nu et à nous avancer
pour nous livrer, avec sérénité, aux pieds de l'Insondable
Félicité.
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