mardi 8 mai 2018

Le prix de nos erreurs





Ce que les deux derniers siècles nous ont appris, à nous autres Hommes du troisième millénaire, aucun autre n'aurait pu nous l'enseigner. Nos contemporains, rivalisant de folie et d'insouciance, déterminés à déployer avec tant de résolution toute l'inertie funeste cumulée par les précédentes décennies, ne peuvent plus le nier. Nous sommes des êtres de nature et notre tendance à nous élever par la culture n'aura été que la forme la plus superficielle de cette même nature, d'aucuns diraient la plus élevée. La mise en confrontation exprimée sur le modèle dualiste entre nature et culture a trouvé son apogée dans l'ère technologique et l'avènement de l'âge de fer. Un âge obscur qui n'a eu de cesse de provoquer la rupture des relations humaines, sous sa forme la plus violemment sournoise, celle de la déliquescence des rapports sociaux réels. Bien au-delà de ce que l'Homme pouvait imaginer, cet âge a entraîné la destruction programmée de toute forme de vie à travers la disparition des éco-systèmes et la dégradation de la biosphère, toutes tendances portées et mises en œuvre par une logique nihiliste et mortifère de prédation marchande. C'est donc au contact froid de cette déshumanisation subitement accélérée de nos sociétés que nous avons dû reconsidérer, hélas bien trop tardivement, notre jugement : nous ne sommes que des êtres de nature, des êtres de vie. 
"Cygnes se refétant en éléphants", Salvador Dali.

Nous ne sommes que des Hommes et nous ne sommes pas autre chose que des Hommes. Et qu'est-ce qu'un Homme ? Nous ne saurions le dire car c'est bien assez de le savoir. Sans doute faut-il l'avoir été soi-même pour le comprendre, puisque de ce savoir ineffable aucun mot ne pourrait témoigner. Notre époque qui se targue de savoir tant de choses quantitativement, et de n'en connaître aucune profondément, nous égara si loin sur les sentiers de la perdition qu'aucun retour ne nous paraît plus envisageable. Au soir de notre existence, dans le reflet lunaire de notre conscience liquidée, liquéfiée, notre dernier visage s'est révélé. Un sursaut, une seule petite étincelle, une vive sensation de douleur. Un déchirement. Le mal-être de l'époque, qui buta brutalement contre le marbre de sa pierre tombale, n'eut pas même le temps de lire l'inscription fatale, d'en déchiffrer l'information, d'en découvrir la date fatidique. C'est ainsi. Qu'on nous accorde tout de même le droit de formuler une dernière requête. Une prière ultime. Peut-être saurons nous finir ce que nous n'avons pas su accomplir, en tâchant de célébrer dignement les derniers instants de grâce reçus en cette terre.

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