lundi 13 juillet 2020

La vision


Mon cœur sent l'orgueil monter dans la bouche de certains de mes interlocuteurs, dans leurs mots, dans leurs aspirations doctrinaires. Ils me parlent de sagesse, de métaphysique. Ils m'exhortent à la vertu et à la piété. Je sens leur imposture et je vois la mienne et cette vue m'éventre le cœur. Mon esprit sent d'une sensation intense le vide intellectuel de mes contemporains dont l'aspect multiforme alimente sans fin la préoccupation. Ce vide m'étouffe, m'accable et je vois cette descente aux enfers, notre lente, très lente descente ponctuée de pierres rouges nous écorchant la chair. Le dogmatisme des uns nous assomment, la vacuité des autres nous ennuient. Nous rêvons de liberté, nous rêvons de nous envoler dans les mondes de l'esprit, ces territoires de Dieu où se préparent en ce moment même et en grande pompe "les journées de Dieu", dans ces contrées éloignées, au fond de tous ces lits où l'on ignore ce qu'est la Nuit. Mais une vision m'a dit qu'entre nous et cette patrie se tenaient à perte de vue des murs, des barrières, des abîmes au bout desquels siégeait une porte solennelle ouvrant elle-même sur une immensité glaciale, désert de ténèbres qu'on n'aperçoit qu'en altitude et portant le nom terrible de Solitude. La vision s'est interrompue et n'a plus rien dit. Alors une voix a poursuivi. En face, au bout de nous mêmes, nous attend l'Hôte suprême.

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