mercredi 30 août 2017
Nos convictions intimes finissent par nous forger
Pour changer d'horizon, de perspective, il n'est pas toujours nécessaire d'aller bien loin. Il suffit parfois, seulement, de changer de position (situation). "Et détournes-toi des insensés" (Coran 7, 199). Si ce qui me fait fasse me tracasse, ce qui me tourne le dos, me fait défaut. Et c'est bien heureux ainsi. Le changement libérateur, avant de produire un cheminement que l'on pourrait définir comme un mouvement fécond d'exploration, de découverte et d'expérimentation, nécessite un mouvement par soi et sur soi, la détermination approfondie et personnelle d'une orientation, la quête d'une direction et d'un horizon à conquérir au point de s'y fondre et de le définir en y marquant son empreinte. Nos souhaits et nos vagues désirs ne définissent pas notre être car ils ne survivent jamais à la confrontation du Réel. Nous ne sommes jamais que ce que nous devenons, c'est à dire ce que nous choisissons résolument d'être et de devenir par nos actes, nos pensées, nos convictions intimes, qui finissent par nous forger au fil du temps et sculpter notre âme.
L'obsolescence programmée de l'homme vue par Serge Carfantan
La Colline publie un texte de Serge Carfantan qui décrit de manière stupéfiante la décadence suprême de notre société contemporaine et la manière dont l'humain s'est laissé asservir. Nos remerciements à Mohamed pour le partage.
« Pour étouffer par avance toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Les méthodes du genre de celles d’Hitler sont dépassées. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes. L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées.
Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste.
Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif. Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser.
On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté.
Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur (qu’il faudra entretenir) sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur. L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu.
Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutienne devront ensuite être traités comme tels. On observe cependant, qu’il est très facile de corrompre un individu subversif : il suffit de lui proposer de l’argent et du pouvoir. »
mardi 29 août 2017
Vouloir le Bien, c’est avoir la force de l’accomplir
La foi se réalise dans son accomplissement terrestre
et cette réalisation implique le combat pour sa survie et son épanouissement à
une époque marquée par les troubles multiples, les déviances généralisées, la
tiédeur et l’indifférence religieuse, l’athéisme militant et les nombreuses
tentatives de liquidation théologiques portées par les projets de
sécularisation extracommunautaires mais aussi de plus en plus intracommunautaires.
Dans ce contexte, il est dangereux et erroné de vouloir différer la réalisation
de la foi dans la vie de l’au-delà au prix d’un renoncement terrestre et
temporel de l’accomplissement du Royaume de Dieu. La vie de l’au-delà est la
continuité inachevée de cette existence qui, du surgissement originel de la
pensée divine à l’ultime résurrection, ne constitue que l’une des étapes de la vie
qui est ce don éternellement insaisissable du Vivant. Dans cette vaste odyssée
tragique ponctuée par ses métamorphoses incessantes, la foi se doit d’être en
mouvement car elle est l’esprit animé, le souffle de vie déterminé par son oscillation
permanente garante de son extension vitale. Ce mouvement s’alimente aussi et
avant toute chose par la nourriture du Verbe divin dont la foi est le fruit et
le cœur la racine. De la confrontation salutaire avec son environnement hostile
naît la force de la Vie et cette étape de la vie terrestre est la scène
centrale de cette réalisation obtenue au prix d’une manifestation spirituelle renouvelée
indéfiniment. Il n’y a pas de vie spirituelle sans accomplissement terrestre du
Royaume de Dieu, ce projet décisif que porte dans ses entrailles l’homme
califale. Vouloir le Bien, c’est avoir la force de l’accomplir.
samedi 26 août 2017
L'absence de certitude n'équivaut pas au doute mais à la suspension du jugement
Les
sceptiques et les partisans du doute se trompent en considérant que
leur option prédicative est la plus sensée, la plus rationnelle et
conforme à la connaissance car douter c'est refuser jusqu'à la
possibilité même de la chose, son caractère hypothétique et son
intelligibilité. Les partisans du doute en repoussant loin d'eux la
possibilité de la reconnaissance prédicative ont fini par se couper
successivement de Dieu, du monde, de la vie, et en dernière instance
de leur propre unité. La certitude est le fondement du savoir et non
le doute. L'absence de certitude n'équivaut pas au doute mais à la
suspension prudente du jugement et à la recherche patiente de la
connaissance. Le doute est une obscuration de la pensée, de
l'intelligence et du cœur. En ce sens, il est et demeure un facteur
de régression sapientale. Contre Descartes donc, Parménide pour qui
« pensée et être sont une seule et même chose ». Une
perception confiante et généreuse dans le mouvement expansif de la
vie de l'Être.
mercredi 9 août 2017
vendredi 21 avril 2017
Faut-il voter ou s'abstenir ? Les termes d'un débat confessionnel agité
Alors
que vient de se terminer le salon du Bourget organisé par l'Union
des organisations islamiques de France, une question hantait tous les
esprits à quelques jours du premier tour des élections
présidentielles françaises : faut-il voter ou s'abstenir ?
Tout
a commencé par le lancement d'un pavé dans la mare il y a environ
un mois de cela. Dans l'extrait d'une vidéo mise en ligne au mois de
mars mais enregistrée en janvier 2017 dans le cadre d'une
intervention effectuée au cours d'une conférence organisée par
l'Union française des consommateurs musulmans (UFCM), Tariq Ramadan
défend l'idée d'une abstention active, idée de plus en plus
développée ces dernières années en France par des intellectuels
tels qu'Etienne Chouard et revendiquée dans un ouvrage récemment
publié par Antoine Bueno intitulé «No vote ! Manifeste pour
l'abstention».
L'intellectuel musulman met en avant le caractère
factice de l'élection marquée par l'émergence de pseudos candidats
anti-système qui ne seraient que le pur produit du macrocosme
marchand dominant la société française, à l'instar notamment d'un
Emmanuel Macron. « Il y a une vraie position politique à
refuser la manipulation politique » a déclaré Tariq Ramadan
qui a par ailleurs répondu dans une seconde vidéo à ceux qui
l'accusaient de contradiction dans sa posture, lui qui a ces deux
dernières décennies encouragé les citoyens de confession musulmane
à s'engager et à aller voter.
La
consigne de l'UOIF : voter absolument !
Cette
prise de position abstentionniste stipulant qu'« en allant
voter vous participer d'un système qui vous vole la pensée »
a semble-t-il perturber un consensus politique intracommunautaire sur
la participation politique des citoyens musulmans, consensus acquis
difficilement après des batailles religieuses interminables sur le
caractère licite ou non du vote. L'UOIF qui défend la
participation politique des musulmans, tout en niant explicitement
faire elle-même de la politique « en tant que structure »,
a comme chaque année organisé des débats sur le sujet de la
participation politique.
L'absence de Tariq Ramadan à cette session
2017 a été d'ailleurs remarquée tant sa présence et ses
nombreuses interventions font partie chaque année des temps forts de
la Rencontre annuelle des musulmans de France. Faut-il l'attribuer à
sa prise de position sur l'abstention active ? Il demeure que le
président de l'UOIF Amar Lasfar qui arrive au terme de son mandat de
président a déclaré que la seule consigne à exécuter absolument
était celle d'aller voter.
Dans le même sens, le conférencier
Nabil Ennasri a déclaré au cours d'un des débats de la RAMF que «
L’abstention, c’est le mauvais choix : on ne pèse rien du tout
», «déclenchant des applaudissements» selon Cécile Chambraud du
quotidien Le Monde. Il y a donc bien un clivage entre les deux
positions.
Yamin Makhri : «Aucun changement réellement positif ne peut venir des urnes»
Ce clivage est d'autant
plus intéressant que la position de Tariq Ramadan fait écho à
celle du fondateur des éditions Tawhid et membre de l'UFCM, Yamin
Makhri, qui a développé dans un texte partagé sur la page facebook
de Tariq Ramadan, un texte approfondi de réflexion qui resitue la
question du vote dans une perspective plus large qui est celle de la
société de consommation et du néo-libéralisme.
Voici quelque
éléments d'analyse avancés par son auteur : «L’abstention
devient une option de plus en plus ouvertement assumée face à une
illusion du choix démocratique » (…) Une société qui a déifiée la croissance, le travail et qui compense sa misère existentielle dans un consumérisme effréné ne peut plus le dénoncer » (…) La politique, elle-même, nous est présentée comme le monde dans lequel on voudrait nous maintenir : une marchandise. On cherche à nous "vendre" un candidat dans un spectacle déprimant et vide de sens, se répétant à chaque campagne présidentielle. Les consommateurs-citoyens doivent se soumettre à l'offre qui leur est offerte aidées par les agences médiatico-publicitaires toujours intéressées (…) Aucun changement réellement positif ne peut venir des urnes : le gouvernement n’aura qu’une faible marge de manœuvre et il n'aura d’autre choix pour continuer de se financer que de se plier aux logiques marchandes avec son lots de guerres, ses ravages écologiques et sociaux».
Le
néolibéralisme a vidé le vote de tout sens
Pour
Yamin Makhri, le vote comme l'élection n'ont plus de sens car ils
ont été vidées de leur finalité par un néo-libéralisme qui a
imposé son système de valeurs chosifiant et aliénant et s'est
substitué de fait aux instances légitime de la vie politique
(Nation, démocratie, République). La plupart des candidats
défendent d'ailleurs selon lui la même ligne idéologique
fondamentale : « Des
libéraux de gauche (Macron, Hamon) ou de droite (Fillon) à leurs
adversaires keynésiens-étatistes de la gauche radicale (Mélenchon)
ou d’extrême-droite (Le Pen), ils partagent tous le même amour du
travail, la même obsession pour la croissance économique et le même
désintérêt vis à vis d'une marchandisation toujours plus
croissante de nos vies ». Il est intéressant de constater que
cette position en faveur de l'abstention active s'inscrit dans une
analyse plus large sur la véritable nature du pouvoir, sur la
manipulation que constitue l'élection de personnes qui ne décident
plus, sur les effets pernicieux de l'idéologie dominante
néo-libérale et son caractère totalitaire dans la vie des Hommes.
A cette position conjointe de Tariq Ramadan et Yamin Makhri, deux
réponses ont été proposées.
Noureddine
Aoussat : l'abstentionnisme «est illusoire»
L'imam
et écrivain Noureddine Aoussat a publié la première partie d'une
tribune sur un blog Médiapart qui est une réponse ouverte adressée
à Tariq Ramadan.
Il critique la position de l'intellectuel en lui
reprochant de ne pas la fonder sur une analyse écrite et argumentée
qui soit rigoureuse. Noureddine Aoussat, qui qualifie l'abstention
active d'oxymore, exprime par ailleurs son scepticisme sur la
réussite d'une telle entreprise étant donné la diversité des
motivations menant à l'abstentionnisme. «Vous a-t-il échappé que réunir les abstentionnistes anarchistes, les abstentionnistes dégoûtés par les turpitudes des politiciens, les abstentionnistes anti système, les abstentionnistes révoltés par cette démocratie factice minée par les corporatismes, les abstentionnistes pour des convictions religieuses ou supposées telles…, et d’autres types d’abstentionnistes est tout simplement illusoire ? (…) Juste
à titre d’exemple, est-il possible de faire converger les actions
des abstentionnistes musulmans avec les abstentionnistes
anarchistes ? Ma réponse est un non catégorique. En effet, les
théories du comportement collectif stipulent que l’individu, en
l’occurrence l’abstentionniste, met avant tout en jeu son
identité personnelle lorsqu’il rejoint un groupe».
«Notre
problème... notre manque de vision commune»
L'imam
qui critique avec virulence les termes de l'alternative « Voter
ou résister » s'interroge : « Quel intérêt donc, vous et ceux qui promeuvent cette abstention, avez à replonger les musulmans dans l’abstentionnisme qui les a longtemps handicapés ? ». Noureddine Aoussat attribue enfin ce qu'il perçoit comme une incohérence politique à un manque de vision communautaire des musulmans. « Notre problème, c’est avant tout notre manque de vision commune ; l’absence de volonté de convergence entre les différents acteurs et prédicateurs ; l’absence de cohérence dans les discours des uns et des autres. Notre problème est notre refus de nommer nos tabous ; de reconnaître nos lacunes et nos défauts. Le problème des musulmans en France, et leur position vis-à-vis du vote en est un exemple criard : c’est que l’action du musulman -individu ou groupe- n’est farouchement contrée et combattue que par l’action d’un autre -individu ou groupe- musulman (…) Voter
ou refuser de voter n’est pas uniquement une tactique, mais une
vision, une conception, voire une idéologie au sens noble du terme.
Et c’est ce par quoi nous devrions commencer ». Une posture
communautaire semblant contredire son propos préliminaire :
« C’est en tant que citoyen français ET musulman soucieux de
l’avenir de notre bateau France sur lequel nous sommes embarqués,
en tant qu’acteur associatif engagé sur ces questions de société
(…) (et) point en tant qu’imam ou prédicateur que je critique
votre appel ».
Fouad
Imarraine : le vote doit être l'aboutissement d'un engagement
Une
autre critique formulée indirectement contre l'abstention émane de
Fouad Imarraine, un autre acteur historique de l'associatif musulman,
membre fondateur du Centre Malcolm X et proche de l'UFCM, qui défend
la nécessité du vote, ce qui témoigne il faut le souligner d'une
pluralité de positions divergentes au sein d'acteurs associatifs
proches.
Tout en reconnaissant la nécessité de trouver une
alternative à l'hégémonie du néolibéralisme marchand, Fouad
Imarraine estime que « quelle
que soit la conduite politique menée, la participation citoyenne est
vitale ; sans elle aucun système étatique ne peut tenir, ni même
se concevoir (...) Il est donc crucial, que dans une démocratie,
l’engagement du citoyen soit effectif pour assurer un rapport
équilibré entre les pouvoirs. Sans cet équilibre entre les
pouvoirs, la cohésion du groupe, la cohésion sociale, sont
grandement menacées. Sans cela, les fondements de la société
s’écroulent (…) Pour le citoyen, être absent de cette arène
politique le destitue et rompt l’équilibre des pouvoirs qui sont
ensuite redistribués ».
«La
démocratie est mise à mal à cause de la démission des citoyens»
Fouad Imarraine défend
donc une position électoraliste se situant dans le prolongement
classique des théorie politiques démocratiques insistant sur le
caractère vital et fondateur du vote, mais à une nuance près. Pour
lui, le vote n'est que l'aboutissement d'un engagement citoyen plus
global et permanent et sa valeur est donc proportionnelle à
l'investissement citoyen accompli au quotidien. « L’acte de vote
n’est le plus souvent que l’aboutissement et la sanction d’un
processus plus long d’engagement volontariste (manifestations,
désapprobation, engagement associatif, sensibilisation écologique,
identitaire, humanitaire…) (…) La volonté de consécration de
cet instant chez certains ne brille en vérité que par l’absence
d’intérêt et d’engagement dont ils ont fait preuve le reste du
temps. C’est particulièrement caractéristique d’une partie des
musulmans qui se réveillent quand les campagnes battent leur plein
ou au moment de glisser le bulletin dans l’urne ; ils escomptent
ensuite renégocier leur place quelle que soit l’issue du
scrutin ». Une position qui fait du vote un recours légitime
et un acte de résistance à tout ce qui menace la démocratie. «
Qu’il s’agisse des idées de l’exclusion et de la haine ou du
capitalisme sauvage, de l’ultralibéralisme, la démocratie est
mise à mal à cause de la démission des citoyens qui ont perdu
toute motivation (…) En tant que musulmans et citoyens des
quartiers populaires, nous devons réitérer autant de fois que
nécessaire le barrage de la route à celles et ceux qui nous
stigmatisent (…) Au moment où le désespoir gagne du terrain,
notre spiritualité doit nous porter à l’acte de résistance ».
La fin des
démocraties ?
Voter ou résister, voter
pour résister, les termes du débat étant posés, que faut-il en
penser ? A la lecture et à
l'audition des arguments des pour et des contre, il faut bien dire
que l'analyse la plus aboutie demeure à ce jour du côté des
partisans de l'abstention active. Pourquoi ? Pour des raisons de
cohérence assez simple à saisir. Tout d'abord, reprenons les
arguments énoncés par les critiques de l'abstention active. Celui
défendu par Noureddine Aoussat stipulant qu'une convergence des
partisans de l'abstention est impossible à obtenir est insuffisant
pour une raison simple : le même argument peut être avancé
pour les partisans du vote dans la mesure où il existe plusieurs
raisons de voter pour un candidat, certains électeurs étant séduits par une mesure particulière qui ne sera pas celle qui aura convaincu
un autre électeur. Même chose pour le profil hétéroclite des
électeurs qui se retrouvent dans le choix d'un même candidat, voire
même si l'on souhaite élargir la réflexion, le profil de ceux qui
défendront l'option plus général du vote pour des raisons de
classe, de sentiment communautaire ou d'intérêt général.
L'hétérogénéité des partisans de l'abstention active n'est donc
pas un argument solide. Le second élément qui est la critique de
l'absence d'arguments solides avancés par les défenseurs de
l'abstention qui ne présenteraient pas de vision politique globale
est partiellement juste mais insuffisante. On a vu dans quelle mesure
Yamin Makhri propose une analyse globale très juste et approfondie
de la justification relative à cette option et qui l'amène à
intégrer cette question dans la problématique globale du paradigme
néolibéral avec un questionnement sémantique articulant
parfaitement la vision spirituelle que l'islam porte sur l'humanité
sur la condition actuelle de l'homme post-moderne. Si le principal
intéressé reconnaît lui-même que « dire
non n'est pas suffisant, il faut agir par la suite », les
perspectives alternatives à un modèle démocratique classique ne
sont pas effectivement mentionnées ou proposées. Ceci étant dit,
ce n'est pas une mince affaire et il n'est pas raisonnable de
supposer qu'il suffit de proposer un système global clé en main que
l'on proposerait au grand public en estimant qu'il s'agirait là
d'une panacée qu'il suffirait d'adopter pour sortir d'un cycle de
crises systémiques.
La
fragilité des arguments pro-électoraux
Pour
autant, la critique reste valable et nous verrons qu'effectivement,
il s'agit pour les partisans de l'abstention active d'aller plus loin
et d'affiner leur vision. La fragilité des argumentaires des
partisans du vote dont nous avons brièvement présenté le contenu
se résume à ceci : le vote n'a de sens que dans un système
politique démocratique fondé sur la souveraineté d'un peuple qui
légitime l'existence politique d'une Nation. Cela signifie la
suprématie du politique sur l'économique et la finance, la
séparation des pouvoirs et le respect des principes constitutionnels
fondant la légitimité démocratique d'un Etat de droit et parmi
eux, l'égalité civique des Hommes. Or, la France a objectivement
perdu sa souveraineté politique en intégrant l'Union européenne.
Elle ne contrôle pas sa monnaie, est asservie par une dette qui
atteint dorénavant la totalité de son PIB ce qui traduit sa sujétion complète aux banques internationales, à ses emprunts et à
des taux d'intérêts qui l'ont aliéné de son indépendance. Du
moins, si l'on pense dans le cadre du fonctionnement actuel des
institutions monétaires et financières et des réseaux bancaires
qui déterminent non seulement le fonctionnement des gouvernements en
établissant leur marge de manœuvre économique et leur latitude
mais plus largement en contrôlant la vie et la conscience de
plusieurs millions d'âmes à travers la suprématie d'une idéologie
néolibérale moderniste, ultratechnologisante et
hyperindividualiste. Il est certain que ce problème excède très
largement la question du vote ou de l'abstention mais il est
essentiel de saisir le fait que le vote et ce qui l'accompagne, à
savoir la mythologie démocratique d'un peuple qui choisirait son
destin en consacrant l'expression de sa volonté par l'élection, est
l'un des principaux ressorts de légitimation de cette aliénation
globale portée par la modernité en crise. Voter revient donc à
légitimer un système de dépossession de soi marqué par la
tyrannie d'un consumérisme devenu l'alpha et l’oméga des sociétés
occidentales et, bien au-delà des chaines de télévision et
hebdomadaires, grâce aux moyens redoutables offerts par l'internet
et les réseaux sociaux, du monde entier.
Renouer
avec le sens sacral de l'humain
La
déréalisation des hommes dissous dans le bain acide d'une
virtualité numérique qui n'est que l'aboutissement d'une
dépossession de leur existence, à la fois structurelle mais tout
aussi consentie par les fléaux d'un fatalisme de la désespérance
qu'ils cultivent volontiers, décrit les traits d'un tableau
relativement sombre de notre époque. Sans cette appréhension
globale du mode de vie qui nous est imposé aujourd'hui, sans la
saisie profonde des enjeux de conscience qui président notre avenir
et celui de nos enfants, il sera bien inutile de débattre de
l'importance du vote ou de la nécessité de l'abstention. Toute
liberté implique une responsabilité et toute responsabilité naît
d'une prise de conscience. C'est à un sursaut de la conscience que
nous avons aujourd'hui « espérément » besoin, un
électro-choc, une opportunité de faire imploser pacifiquement « la
machine ». Si le vote est un ultime recours pour protéger
« les siens » d'une menace fasciste de tout temps
alimentée, encouragée, instrumentalisée, arborée et susurrée par
les mêmes langues fielleuses de l'hydre moderniste, alors le vote est
un leurre et une illusion destinée à maintenir en place un
effrayant statu quo, à pérenniser la même domination idéologique
et à consacrer ad
vitam aeternam
l'usurpation du pouvoir, le pouvoir des corps, des cœurs et des
consciences. Couper les têtes de cette hydre multiforme est absurde
et parfaitement inutile car la moindre de nos contestations
l'alimente, nos cris de protestation la nourrisse et nos élans
utopiques la consolident chaque jour un peu plus. Il faut que la Bête
succombe pour que tombe la peur et que la vue du Ciel soit enfin
dégagée de ce sinistre spectacle.
Ne
plus être complices du mensonge
Il
nous faut donc nous engager résolument, et sans crainte des
reproches, vers cette voie de l'abstention active jusqu'à ce que le
pourcentage obtenu atteigne le seuil irréversible de l'implosion et
de la dé-légitimité électorale. Ce taux est variable et l'enjeu
n'est pas de déterminer s'il doit être de 60 ou 70 %, l'essentiel
est de lancer la dynamique et de maintenir le cap. Parallèlement à
cette dynamique, il va s'agir d'identifier les caractéristiques les
plus prégnantes de cette domination et les multiples ressorts à
l'origine de l'aliénation moderniste. Ce travail d'analyse, de
maturation et de proposition doit être réalisé conjointement et en
lien avec l'ensemble des hommes et des femmes déterminés à changer
de société.
Il ne s'agit plus d'élaborer une contre-idéologie
mais de lever les voiles de l'oppression qui étouffent la nature
humaine et d’œuvrer à un retour émancipateur des plus ambitieux
vers une prima natura
fitratique. Voter peut, sous certaines conditions être un acte de
transformation politique ou d'aliénation politique. Notre position
est de ce point de vue très claire : l'oligarchie, qui
n'est autre qu'un faisceau de convergence établi entre la tyrannie
d'une idéologie néolibérale moderniste et mortifère, et des
institutions et individus qui lui sont liés par intérêt ou
conviction, s'appuie sur la légitimité de notre vote. Le catéchisme
démocratique est un leurre destiné à nous faire avaler la pilule
d'une sujétion et d'une servitude devenues désormais intolérables.
Ne soyons donc plus les complices de ce mensonge.
samedi 18 février 2017
Parution du livre "Le goût de l'inachevé"
Le livre est disponible en pré-commande immédiatement sur ce lien : |
Voilà c'est officiel. Je vous annonce la sortie de mon livre "Le goût de l'inachevé" prévue le 6 mars prochain. Il s'agit de mon premier ouvrage. Ce livre est particulier dans la forme comme dans le fond. Ceux qui me lisent sur mon blog depuis des années sauront de quoi je parle. Pour tous les autres, ce livre sera une surprise, bonne ou mauvaise, je vous laisserai le soin d'en décider.
Que dire d'autre ? Il s'agit d'un recueil d'aphorismes de 216 pages distribués en cinq parties et qui traitent de très nombreux thèmes (amour, politique, foi, morale, psychologie, etc). L'avantage est qu'on peut lire cet ouvrage à n'importe quel endroit et le refermer à n'importe quel autre. Autre chose : j'ai fais le choix difficile mais important pour moi de l'auto-édition pour conserver mon entière liberté éditoriale sur ce projet. Ce livre n'existera donc que par votre concours actif, vos relais et vos partages.
Que dire d'autre ? Il s'agit d'un recueil d'aphorismes de 216 pages distribués en cinq parties et qui traitent de très nombreux thèmes (amour, politique, foi, morale, psychologie, etc). L'avantage est qu'on peut lire cet ouvrage à n'importe quel endroit et le refermer à n'importe quel autre. Autre chose : j'ai fais le choix difficile mais important pour moi de l'auto-édition pour conserver mon entière liberté éditoriale sur ce projet. Ce livre n'existera donc que par votre concours actif, vos relais et vos partages.
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