Nous
assistons, sous nos yeux, à la mort de l'humain. Quelle phrase
étrange qui semble suggérer que celui qui la prononce décrirait
autre chose que lui-même, comme s'il n'appartenait déjà plus à sa
famille ontologique. La conscience, cette faculté
auto-réfléchissante de l'esprit, permet cette distanciation et en
ce sens précis elle nous offre déjà une voie de salut, un autre
choix, une possibilité. En laissant la technologie devenir la
médiation maîtresse de nos rapports humains, nous avons ouvert la
porte de notre extinction collective. Nous sommes nés de la vie et
nous sommes des êtres vivants. Nos cœurs se nourrissent de cette
vie qui est le don et le signe de Dieu et de Sa manifestation
indéfinie dans le monde, la nature et les Hommes. La civilisation
moderne ne nous a pas conféré une plus grande liberté comme elle
le promettait. Hélas, la modernité a inscrit dans nos cœurs la loi
obscure du fatalisme technologique. En tournant le dos à la Source
de Vie, l'Homme prométhéen avait initié un lent et long chemin
funèbre vers la Mort éternelle. La mutation technologique qui n'est
autre que le nom savant de la fabrique d'un monstre est à présent
une étape décisive de cette marche ultime. Mais ne nous trompons
pas. Si la fatalité est bien la loi d'airain du fer, drainée par la
force irrésistible du fleuve Léthé, de son courant froid et
anesthésiant, si l'oubli de nous-mêmes nous éteint et si le
spectre nous étreint, la Vie est toujours présente, le Souffle n'a
pas renoncé, la Lumière subsiste là où rien ne peut l'atteindre.
L'envol du papillon demeure une promesse, celle de notre destin, et
aucun oracle malsain n'y changera rien.
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