jeudi 19 juin 2014

FN : la guerre des rappeurs a bien eu lieu



Pour certains journalistes, les rappeurs de cette décennie seraient globalement dépolitisés et la question du Front national ne les heurteraient plus. Une affirmation rapide au vu des derniers développements du rap porté par des artistes comme Médine, Youssoupha et un certain Edel Hardiess.

Dans un article publié mercredi 18 juin, Le Monde.fr titrait
«Le Front national ne fait plus réagir les rappeurs». Signé Stéphanie Binet, celui-ci justifie son titre par ces remarques : «Les groupes de rap des années 2010 n'ont pas la fibre politique de leurs aînés qui pourfendaient dans les années 1990 le «Bleu Blanc Rouge», enregistraient des titres collectifs contre le racisme, ou se mobilisaient entre les deux tours des élections présidentielles en 2002». Pourtant, cette affirmation pour partiellement exacte qu'elle soit, ne l'est plus lorsqu'on embrasse le monde du rap français dans son intégralité. Le FN, ses thèmes de campagnes et la galaxie de militants et de groupuscules qui gravitent autour font bien partie des thèmes de réflexion de certains rappeurs et ces préoccupations se retrouvent dans leurs textes.
 

La Ligue des rappeurs 
 
Citons le dernier album de Médine, Protest song, dans lequel des morceaux comme 
«Blokkk Identitaire», en duo avec Youssoupha, abordent le thème de la violence des tensions identitaires entre militants sionistes, adeptes des black panthers et néo-nazis. 


Usant de scènes choquantes d'agressions racistes, ce clip inscrit bien le thème de la violence identitaire comme sujet de préoccupation brûlant de la planète rap, thème qui est au cœur du vote FN. Le rappeur s'était déjà, à ce propos, fait remarquer des frontistes comme l'illustre cet article d'une section du Front national. 



D'ailleurs, le même rappeur Médine vient de sortir un titre intitulé «MC Soraal», jeu de mots entre l'artiste MC Solaar et le polémiste sulfureux Alain Soral, issu du Front national et très influent chez une partie des jeunes fans de Dieudonné.

Sans doute une manière de laisser entendre que le polémiste s'est auto-attribué le rôle de porte-parole des jeunes de banlieues, à l'instar d'un rappeur.
 

C'est dire, donc, que le Front national fait bien parler et chanter les rappeurs. Un nouveau groupe, La Ligue, incluant Youssoupha, Kerry James, un habitué du rap politique, et Médine, est déjà annoncé pour 2015.

Un rappeur pro-FN ?

Mais d'autres rappeurs ont pris un tout autre chemin à propos du Front national. Un artiste nommé Edel Hardiess a ainsi affiché sa relative proximité avec le parti de Jean-Marie Le Pen. Son album annonce bien la couleur : Le chant des partisans, avec un drapeau français en couverture, et un titre phare «Résistant», autant de symboles du nationalisme français qui sont loin d'être indifférents pour l'électorat de Marine Le Pen. 



Hardiess déclare dans une interview donnée à nos confrères du Courrier de l'Atlas, être moins éloigné des valeurs du FN que de celles du PS ou de l'UMP. Il ajoute qu'il ne s'agit pas d'une relation d'adhésion mais plutôt de favoriser le départ politique des formations de droite et gauche du gouvernement. «Je préfère un ennemi déclaré qu'un traître», a confié le chanteur. Mais sur d'autres sujets comme le mariage pour tous, l'intervention en Libye et au Mali, le cas Snowden, il précise qu'il est tout à fait en phase avec le FN. Une position qui peut paraître surprenante, tant des thèmes comme l'islam ou l'immigration sont les cibles préférées du parti d'extrême-droite. 

L'effet Soral

Faut-il y voir un effet Soral ? Sans aucun doute. L'écrivain français qui a lançé le site Egalité et Réconciliation, très fréquenté, fait régulièrement la promotion de chanteurs et de rappeurs pro-Dieudonné et accessoirement, soraliens sympathisants. 



Citons Kimto Vasquez, Morsay, et même Kerry James que Soral juge proche de sa ligne de rapprochement entre «Français de souche» et jeunes des quartiers populaires, même s'il n'est pas sûr que l'artiste soit d'accord avec ce rapprochement. On l'aura donc compris, loin d'être absent des textes ou des univers politiques des rappeurs, le FN, par divers biais, plane encore sur l'esprit des rappeurs français.









Article publié sur Zaman France

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