mardi 8 avril 2014

A propos du sectarisme féministe !


Aujourd'hui, j'ai eu l'insigne privilège de participer à un débat relativement bref mais explicite sur le voile et le féminisme musulman, avec plusieurs féministes laïques, hommes y compris, sur Facebook. Cela aurait pu s'appeler «anecdote insignifiante dans le monde des certitudes féministes». Mais en réalité, rien est insignifiant. Tout fait sens, toute chose porte en elle-même sa marque et laisse son empreinte dans ce monde qui est nôtre. En ce qui concerne ce débat lapidaire, le sens se trouve, il me semble, dans la posture caractéristique de ce que l'on nomme l'idéologie, cette grille de lecture politique du monde qui transmue ses adeptes en guerriers d'un ordre juste appelé à s'imposer sur les masses, soldats transportés par le souffle religieux d'une inspiration, souvent néfaste. Je ne parle pourtant pas ici des vieilles guerres européennes de religions, pas plus que des Croisades. Voici les attendus de ce qui fut un procès, accompli dans le tribunal invisible de l'excommunication subite prononcée par des jurés tapis dans l'ombre de leur dogme, qu'on appelle parfois «bassesse».



Fatima-Ezzahra Benomar : Il y aurait donc un féminisme qui passe par l'acceptation du voile, ce fameux voile qui ne concerne que la moitié femmes de l'humanité ? Eh bien. Tant de décennies de luttes courageuses des femmes dans le monde, tant d'héroïnes dont on ne connait pas le nom, tant de lutteuses ensanglantées pour arriver à cette conclusion. En fait, les religieux n'avaient qu'à nous laisser faire, les dénoncer, nous libérer sexuellement, risquer nos vies en affrontant leurs dogmes sacrés... pour qu'on retourne sagement au point de départ dont nous nous étions péniblement arrachées. Et rajouter qu'en vrai, ce voile-là se choisit, et peut nous être agréable. Il est quand même fort, ce patriarcat !

Le patriarcat a rarement été, dans l'opération d'asservissement des femmes, un régime qui s'impose par la force. Les us et coutumes patriarcales sont intériorisées dès l'enfance, et observées par les femmes aux quatre coins du monde, tant qu'elles n'ont pas analysé et qu'elles ne se sont pas élevées contre leur condition commune. Donc oui, beaucoup de femmes dans le monde pensent choisir d'admettre ce régime, de se soumettre à ses règles inégalitaires et profondément sexistes, et c'est le devoir des mouvements féministes de les convaincre que ce système est injuste et violent.


Laurent Lévy : La question demeure : est-il juste (et productif) d'interdire le port du foulard à l'école. Pour mémoire, quelques centaines de gamines, pour la plupart issues de milieux populaires, ont été déscolarisées à la rentrée 2004. Est-ce qu'on règle les questions idéologiques et politiques par des mesures administratives et de police, par la répression ?

Fouad Bahri : La question est plus fondamentale Laurent, je crois. Il s'agit à la lumière de nos expériences humaines de plusieurs siècles de commencer à mûrir une double attitude, faite de savoir et de sagesse. La notion d'émancipation est une notion relative à la situation du dominé, le mode d'émancipation est relatif à sa weltanschauung. Imposer une conception de l'émancipation et un modus operandi à l'ensemble des humains est une aberration, une posture excessive autrement dit injuste. Nier la liberté de croyantes au nom de la liberté est un extrémisme qui rappelle l'injonction de Robespierre : «Pas de liberté aux ennemis de la liberté». Les pseudos discours qui parlent d'aliénation de ces femmes sont d'une malhonnêteté suintante. Quant au déterminisme radical défendu par Loukass, il abouti à une négation de la liberté et il constitue une arme à double tranchant. Appliqué au féminisme revanchard et de combat, il lui ôte sa substance libérale et proclame l'avènement d'un fatalisme adulé sous les oripeaux de la modernité. La France n'est plus depuis longtemps une société patriarcale. Tous les attributs du patriarcat lui ont été soigneusement retiré. Sécularisation, libéralisation des moeurs, fin du modèle traditionnel de la famille, émergence d'un discours dominant politiquement correct sur le féminisme et autres postures libertaires : je ne vois pas ce qu'il y a de patriarcale dans tout ceci. Dernière chose : le voile est globalement une marque de pudeur et de proximité spirituelle d'une croyante avec Dieu. Ce même principe de pudeur est appliqué aux hommes, qui font souvent preuve, dans les milieux religieux, d'un rigorisme vestimentaire (qamis, chechia, barbe) comparable, qui recouvre la quasi totalité de leur corps. Il n'y a guère que les cheveux qui sont couverts en plus chez les femmes et encore, dans plusieurs pays arabes du Golfe, les hommes portent une longue capuche qui couvrent leurs cheveux. Ne nous trompons pas d'analyse et n'excommunions pas politiquement des individus en raison de leur foi.

Fatima Ezzahra-Benomar : Ce qui est sympa avec ce genre de statuts, c'est que ça permet de débusquer les affreux masculinistes qui se cachent dans nos listes d'amiEs, et de les raccompagner vers la sortie. J'adore le passage négationniste : «La France n'est plus depuis longtemps une société patriarcale. Tous les attributs du patriarcat lui ont été soigneusement retiré. Sécularisation, libéralisation des moeurs, fin du modèle traditionnel de la famille, émergence d'un discours dominant politiquement correct sur le féminisme et autres postures libertaires : je ne vois pas ce qu'il y a de patriarcale dans tout ceci.»
Zemmour, sors de ce corps !


Pol Nasens : Les femmes voilées d'Europe encouragent la répression dans les dictatures islamistes. Ayant la chance de vivre dans des pays démocratiques, elles ne se rendent pas compte qu'en portant «librement» le voile, elles cautionnent l’aliénation de la femme dans les théocraties. Le voile permet au système islamiste d'affirmer son pouvoir machiste dans la rue.

Fatima-Ezzahra Benomar : «Elles» rien du tout. Elles ont des mecs derrière elles.
Le voile est un fantasme, une volonté et un projet de domination masculine, entretenu et imposé, par la force, par l'intimidation ou par l'élaboration d'une culture patriarcale, par "les hommes"

Fouad Bahri : Fatima-Ezzahra Benomar ! Vous m'obligez à utiliser un autre compte pour vous répondre (après avoir été exclu de sa page, ndlr). Votre attitude est sectaire, vous excluez tout ceux qui ne pensent pas comme vous. Je connaissais vos positions idéologiques et pourtant je ne vous ai jamais exclu de mes contacts car ce n'est pas ma philosophie. Votre attitude est réellement dommageable, pas pour moi, mais pour vous. Vous renvoyez une image radicale et intolérante de vos postures idéologiques alors mêmes que des individus comme moi pourraient partagez des vues communes avec vous sur d'autres sujets comme la justice sociale ou la condamnation de la violence. Encore faut-il avoir la maturité de dialoguer avec les autres et de sortir de son auto-satisfaction qui pousse qu'à ne parler qu'entre soi. Ce qu'on appelle du communautarisme, je crois. Bien dommage.

Fin.

PS : remplacer féministe par capitaliste, communiste, islamiste, écologiste ou ce que vous voudrez et vous obtiendrez régulièrement, bien que non nécessairement, le même résultat. L'absence d'arguments, l'excommunication immédiate au nom des valeurs les plus nobles (vérité, justice, liberté, égalité...), le procès d'intention, la diabolisation...

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