jeudi 3 juillet 2014

Ramadan, le mois de tous les possibles...



On a beaucoup parlé du Ramadan, de ses pratiques, de son ambiance, de ses bienfaits. Mois de jeûne, d'ascèse, d'abstention, d'effort et de patience : c'est en quelques mots ce que nous pouvons en dire et ce que nous en disent volontiers les théologiens. Mais quoi ? Faut-il réduire ce mois au jeûne ?

Certes, c'est sa dimension immédiatement perceptible par le commun des fidèles. Mais le Ramadan est aussi le mois du Coran, le mois où la Révélation divine est descendu du Ciel vers la Terre. La prière du soir dite Tarawih, célèbre précisément cet évènement par la récitation mensuelle de la totalité du texte coranique.

Plus encore : il semble que l'arcane secrète de Ramadan soit là. La Nuit du Destin a scellé à tout jamais dans l'histoire humaine ce que pouvait être la rencontre entre l'au-delà et l'ici-bas. Parole de Dieu, Message lumineux projeté des profondeurs du Cosmos, le Coran, cette Parole perpétuellement Vivante à l'image d'un organisme, a été révélé en cette Nuit unique.

Dieu lui-même y descend, escorté de ses Anges jusqu'au premier Ciel pour s'enquérir de ses créatures raconte la tradition religieuse musulmane. 


 

Redevenir soi-même

Une Nuit équivalente à mille mois, un Mois sans équivalent dans le calendrier lunaire et solaire : le Ramadan semble réserver ses trésors de sens et de beauté au plus valeureux des aventurier(e)s de l'âme qui se risquera à entreprendre la plus fantastique des expéditions. Car Tout est dans Ramadan et tout Ramadan est Un.

Pardon ! Avant qu'un zélé serviteur ne nous convoque au tribunal de la pensée théologique, précisons notre propos. Il semble que le Ramadan réunisse en lui toutes les composantes essentielles de l'islam, ses multiples piliers. La globalité de l'islam, à ne pas confondre avec la totalité ni même avec le totalitarisme, trouve là sa plus belle incarnation.

Le jeûne du corps durant le jour, la nourriture céleste de l'âme durant la nuit. Mais encore : la nourriture du coeur le jour durant, ponctué des repas intérieurs que sont pour le fidèle la prière du jour, le dhikr et les invocations quotidiennes ; le banquet du corps la nuit tombant.

Dans un sens comme dans l'autre, on ne sait plus où commence le jeûne et où finit sa rupture. Mois du Bien par excellence, le Ramadan est aussi cette pause métaphysique où la racaille diablotine des Djinns s'en va flâner dans les fosses de l'Enfer, malgré eux il faut le reconnaître.

Le temps d'un souffle lunaire, les musulmans retrouvent leur plénitude ontologique, celle de la fitra (nature primordiale) sans autre intervention dans leur vie que celle de leur Créateur, Dieu le Très-Haut, l'Unique. Plus de suggestion maligne, sinon celle de leur âme.
 



Donner pour s'accomplir

Période de spiritualité, je vous le concède, bien qu'on ne saisisse plus vraiment le sens de ce terme assez galvaudé. Mais pas seulement. Le partage et le sens des valeurs est bien présent. A l'approche de l'Aïd, l'heure de la zakat al-fitr pointe déjà le bout de son nez et avec elle l'impératif du commandement salutaire, celui du don.

«Ce que tu donnes est à toi pour toujours. Ce que tu gardes est perdu à jamais.» Ce proverbe soufi exprime de belle manière la philosophie du don. Donner pour répandre sa signature spirituelle sur les choses, sur les êtres, sur le monde. Atteindre l'angélisme diront certains. Peut-être. Pourquoi pas ?

Les Anges ne mangent ni ne boivent. Ils volent et illuminent les Cieux. Mais les Anges ne choisissent rien. Dénués de libre-arbitre, leur vie est une pure détermination divine. Alors parlons plutôt d'humains angéliques ou d'anges-humains. Qu'importe.

Le royaume de Dieu est à construire sur la Terre dirait un chrétien, avant d'être offert dans les Cieux. C'est cette délicate entreprise que l'homme, à travers l'islam, est appelé à accomplir. Alors jeûnons, mangeons, buvons et festoyons. Prions, méditons et lisons. Les jours se terminent. La Nuit approche...

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